Chapitre 33
Les ténèbres avaient englouti la vision de Wendy comme celle de Nitipon quelques minutes auparavant. Elle semblait avoir chuté dans une abîme d'où plus rien ne pouvait la tirer. Ces preuves, ce témoignage, mêlés à tout le reste, ne faisaient que confirmer le verdict : il était coupable. Cela ne pouvait être que lui. Mais la Phyllali refusait d'y croire. Il ne pouvait pas avoir tué Mme Sola. C'était impossible. Elle le connaissait depuis des années, il était si gentil, si sensible ! Il paniquait rien qu'à l'idée de devoir faire du mal à quelqu'un. Il ne pouvait pas avoir menti, si...?
« Désolé, Wendy, mais c’est terminé, annonça Clocrut. Je ne suis pas ravi de devoir le dire, mais notre Tiplouf est coupable du crime. Il n’y a aucune autre possibilité. »
Elle fronça les sourcils et le regarda. Il semblait rire, presque, d’avoir réussi à lui prouver que Nitipon était responsable du meurtre. Sa raison lui disait que c’était évident. Mais ses sentiments, son instinct, lui répétaient le contraire, comme si elle sentait, au travers des arbres, de la puissance de cet endroit qui avait logé et protégé tant de Pokémon, que quelque chose n’allait pas. Elle n’arrivait pas à déterminer quoi, pourtant… Elle ferma les yeux quelques instants et se concentra. Clocrut continua, comme pour appuyer :
« C’est impossible que qui que ce soit d’autre ait pu tuer Mme Sola.
- Ah. Vraiment ? »
Le ton de la Phyllali était devenu froid et dur. En cet instant précis, lui qui avait pourtant été son ami, son collègue pendant si longtemps, elle le haïssait plus que tout. Comment pouvait-il prétendre envoyer un des habitants à la mort sans éprouver le moindre regret ? Comment pouvait-il agir comme un monstre envers ce Pokémon qu’il avait pourtant tant apprécié ? Qu’il ait tué Mme Sola n’excusait rien ; ils avaient vécu ensemble pendant si longtemps, et il était le seul de tous qui osait aller jusqu’à se moquer de lui ! Qu’il en soit ainsi. Elle continua :
« Vraiment ? Vous pensez vraiment que personne d’autre n’aurait pu tuer Mme Sola ?
- Vous n’allez pas accuser les enfants de l’avoir fait, tout de même…
- Et si je le faisais ? »
Wendy but une nouvelle gorgée de thé avec un calme et une détermination qui, pour la première fois depuis qu’il était monté à l’accusation, déstabilisa Clocrut. Il semblait parfaitement voir là où il voulait en venir, et ça ne tournait pas en sa faveur. Tous les regards étaient posés sur elle, la jeune guérisseuse si timide et introvertie, qui aujourd’hui se jouait de tous dans le seul et unique but de sauver son meilleur ami. Ce n’était qu’au moment où elle s’apprêtait à le perdre qu’elle se rendait compte de sa valeur.
« Lorsque vous éliminez toutes les possibilités, alors l’impossible en devient une, déclara-t-elle. Reprenons dans l’ordre. Excluant Nitipon et Lumen, il n’y avait que les sept enfants, ainsi que Séraphin, plus d’éventuels autres arrivants qui auraient pu emprunter le même passage que ces derniers. Dans tous les cas, les enfants sont des participants au meurtre, à partir du moment où ce passage existe et qu’au moins l’un d’eux a avoué le connaître.
- Et il faut préférer ce qui est impossible mais vraisemblable à ce qui est possible mais incroyable, s’exclama Clocrut, interloqué par ces propos. Vous vous rendez compte que vous êtes en train d’accuser des enfants d’avoir assassiné leur propre mère ? Tout cela ne tient pas debout, c’est insensé et indécent !
- C’est pourtant la même chose pour Nitipon. Qu’est-ce qui le différencie des enfants ? Il avait lui-même un passage vers la surface. Il aurait pu parfaitement être piégé par ces derniers. C’est trop facile, tout le pointe. Il n’aurait pas pris le risque de se faire tuer, qu’importe son secret, ne pensez-vous pas ? La logique aurait voulu qu’il s’enfuie avec son prétendu allié, si c’était vraiment trop dur à porter ; il en avait la parfaite possibilité. Par contre, les enfants… Eux ne peuvent pas fuir. S’ils voulaient se débarrasser de leur mère, la tuer était leur seule option. »
L’assemblée était complètement choquée par les propos de Wendy, les enfants les premiers. Nitipon lui-même ne comprenait pas ce qu’elle était en train de dire. Elle passait pour une monstre aux yeux de tous, à envisager cette possibilité. Mais elle était prête à tout pour réussir à démontrer que son ami était innocent, car il l’était forcément. Elle but une nouvelle gorgée de thé et leva ses yeux vers le chef. Bizarrement, il ne la regardait pas… Comme un être terrifiant, non. Il semblait presque… Impressionné, mais dans le bon sens.
« Vous ressemblez à votre mère, Wendy, déclara le Tengalice pour trancher les murmures de mépris qui emplissaient la pièce. Capable d’envisager le pire comme le meilleur pour réussir à faire triompher la vérité…
- Vous… Vous êtes d’accord avec elle ?! s’écria Clocrut.
- Wendy a soulevé un point intéressant. C’est la défense, et nous sommes dans un procès. Les enfants ne sont pas exempts de toute suspicion. Cela fait sept ans qu’il n’y a pas eu d’affaire de meurtre, et la dernière fois, un enfant était impliqué. »
Et cette fois-là, c’était sa mère qui avait défendu l’accusé, et brillamment triomphé… Wendy s’en souvenait, maintenant. C’était très lointain, dans son esprit, car elle était alors toute petite ; mais cette histoire avait fait tellement de vagues qu’aujourd’hui encore, on se souvenait d’elle comme une brillante enquêtrice. C’était aussi pour ça qu’elle avait décidé de défendre Nitipon à tout prix. Dans son subconscient, des cloches avaient résonné, lui rappelant l’hérédité de sa mère et sa mémoire à porter…
« Il y a sept ans de cela, un Pokémon a été assassiné, reprit le Tengalice. Le coupable était un ami de la victime, qui, jaloux de sa femme dont il était profondément amoureux, avait décidé de le provoquer en duel. Cela a mal tourné et le mari a été tué. Le meurtrier, aidé par son fils, s’est débarrassé du corps en le cachant sous le lit de la mère, pour lui faire porter le chapeau. Incroyable en apparence car les deux l’aimaient profondément, mais c’est pourtant bien que ce qui s’est passé. »
Oui, Wendy s’en souvenait nettement plus clairement. Depuis que sa mère était morte, elle s’était refusée de trop penser à elle, et avait préféré ne pas trop s’informer sur cette histoire… Mais c’était évident, à présent, que c’était bien cela qui s’était passé. Elle n’aurait qu’à réitérer le miracle. Elle était prête à le faire, quoi qu’il en coûte. Elle était peut-être sur une piste, là. Une idée qui pouvait s’avérer choquante mais qui vaudrait beaucoup mieux que de risquer à faire condamner l’innocent qu’était Nitipon. Elle devait y croire.
« Je voudrais interroger Séraphin plus en détail, Chef.
- Que cela soit fait. »
Clocrut ne semblait pas aimer la tournure que cela prenait, et le petit Ponchiot, accusé d’un crime, paraissait complètement terrifié. Lui et son jumeau ne devaient pas avoir plus de 3 ans. Leur mère, hors d’elle, regardait Wendy s’approcher calmement de son fils, et elle semblait prête à lui sauter dessus pour lui arracher la gorge. Heureusement pour la guérisseuse, les citoyens retenaient la protectrice des deux frères, évitant ainsi que tout cela ne vienne à dégénérer et qu’il y ait des conséquences fort regrettables à ce procès.
« Séraphin, je te prie de récapituler depuis le tout début ta version des faits. N’omets aucun détail, je te prie. »
Le Ponchiot, beaucoup trop terrifié pour oser répondre sur le coup, tremblait de tous ses membres, mais Wendy ne sourcilla pas. Il agissait, somme toute, assez normalement. C’était un enfant accusé d’avoir fait une bêtise, exposé au le regard de tous. Mais comme pour n’importe quelle personne de l’auditoire, il était parfaitement impossible de savoir si c’était à tort ou à raison. Il était temps de savoir enfin la vérité. La Phyllali était persuadée d’être à deux griffes de l’atteindre, il ne lui manquait plus grand-chose pour y être.
« Hum… Eh bien… Nous avions… Décidé de nous réunir dans la chambre tous ensemble pour préparer des surprises pour nos mamans. C’est la fête des mamans dans trois jours alors on voulait faire une sorte de cadeau groupé, mais vu qu’on n’avait vraiment pas d’idée, on a décidé de se réunir de nuit pour en parler.
- Pourquoi ne pas l’avoir fait de jour ? Ça vous aurait évité bien des peines, non ?
- On… On voulait vraiment que ce soit une surprise, vous comprenez ? Si nos mamans nous avaient vus nous réunir, elles se seraient doutées de quelque chose. Et puis avec le couvre-feu, on pouvait pas se voir comme on voulait… »
Wendy hocha la tête. Jusque-là, tout semblait relativement normal. Mais le fait que les enfants l’aient caché pendant aussi longtemps était définitivement suspect, un peu… Comme s’ils ne voulaient pas le dire pour une raison précise. S’ils n’étaient pas coupables, ce que Wendy ne pouvait ni affirmer ni infirmer, alors ils devaient définitivement avoir quelque chose à se reprocher, quelque chose de suffisamment important pour mentir. L’anxiété visible des enfants Pachirisu et du frère jumeau de Séraphin, Raphaël, ne faisait que confirmer ses doutes.
« Combien étiez-vous ?
- J’étais venu seul, Raphaël voulait assurer nos arrières en restant. Au début, on était tous réveillés, mais quand j’ai dû partir, seul Armas était encore debout. C’est là qu’on a vu Nitipon retourner vers sa chambre.
- C’est là que vous avez vu quelqu’un de méconnaissable entrer dans la chambre de Nitipon, corrigea Wendy en buvant une gorgée de thé. Poursuivez.
- C’était la première fois que… Que je venais dans la CFB. Pour éviter de nous faire remarquer, on a décidé d’éteindre la lumière de la chambre, et on en avait à peine dans le couloir. On devait vraiment faire le moins de bruit possible.
- Comment es-tu entré ? Et surtout, comment comptais-tu sortir ?
- On avait tout prévu. Je suis arrivé la veille, pendant le repas, Armas a prétexté devoir aller aux toilettes et m’a fait rentrer dans leur chambre. J’ai attendu là jusqu’à l’heure de leur coucher. Normalement je devais repartir le lendemain en suivant la même stratégie.
- Normalement ? C’est-à-dire ?
- Ben… On a… Trouvé Mme Sola, et vu… La silhouette, alors… Je suis parti comme j’ai pu. Armas ne voulait vraiment pas qu’on me remarque… »
C’était définitivement suspect. Mais Wendy n’avait pas de preuves tangibles contre les enfants… Et ça ne semblait la mener nulle part pour le moment. Elle tournait en rond. Elle ne devait peut-être pas jouer sur comment ils l’avaient vu, mais ce qu’ils avaient vu précisément. La Phyllali se doutait bien que la façon dont était sorti Séraphin était essentielle, mais elle n’arrivait ni à définir en quoi, la nature de cette façon. Soudain, une théorie se forma dans son esprit. Quelque chose de parfaitement tordu mais qui pouvait tout expliquer.
« Séraphin. Tu affirmes être sorti au plus vite, n’est-ce pas ?
- Hum… Oui, pourquoi… ?
- Il n’y a que deux voies de sortie depuis le sous-sol. La première est le classique : les escaliers. Mais étant surveillés par Clocrut et Taki, il n’y a aucun moyen de passer sans se faire voir. La seule option restante est donc évidente. Les chambres ont toute été fouillées, et il n’y a qu’une issue : le tunnel de la chambre de Nitipon. »
Un long silence, durant lequel Wendy finit sa tasse avec un calme remarquable, suivit. Séraphin paraissait encore plus tremblant qu’avant. Trouvé. Elle savait où appuyer, à présent. Les enfants devaient connaître le tunnel, pour une raison ou pour une autre, et s’en étaient servis. Si elle réussissait à démontrer qu’ils étaient peut-être même ceux qui l’avaient creusé, alors elle tenait définitivement le bon bout ! Il fallait qu’elle prouve à tous que cette histoire n’était qu’une mascarade pour cacher les véritables criminels. Elle regagna son poste de défense.
« Bien joué, Wendy, annonça Clocrut. Vous avez réussi à établir une connexion logique entre la route de sortie de Séraphin et le tunnel de la chambre. Bravo. Mais une question se pose alors… Comment les enfants avaient-ils connaissance du tunnel ? Ce tunnel était secret et bien caché, et se trouvait dans la chambre où le meurtrier de Mme Sola se situait selon toute logique. Vous n’allez pas me dire qu’ils ont pu connaître le tunnel, et en plus suivre les pas du tueur, au risque de subir le même sort que la mère ? »
Le Wattouat était décidément agile avec les mots et la logique. Les points qu’il soulevait étaient tout à fait véridiques. Comment les enfants auraient-ils pu savoir, sans s’y rendre, qu’un tunnel se trouvait dans cet endroit ? Et pourquoi prendre le risque de se rendre dans la pièce du tueur… ? Elle commençait à se demander si elle ne faisait pas fausse route. Mais la réaction de Séraphin disait tout ! Elle était sur la bonne voie, il fallait juste qu’elle réussisse à l’expliquer une bonne fois pour toutes !
« C’est pourtant simple, Clocrut. La raison pour laquelle les enfants connaissaient le tunnel, c’est tout simplement parce qu’ils en étaient les créateurs.
- Pardon ?! Vous plaisantez, j’espère ? s’écria la mère des deux Ponchiots, outrée.
- Tout s’explique par ce simple biais, pourtant. Prenez un enfant paniqué connaissant Tunnel, qui peut s’échapper en en creusant un. Que va-t-il faire ? Le creuser pour partir. Nous avons toutes les conditions réunies. »
Clocrut ricana alors. Il partit dans une grande crise de fou rire, étrange et déplacée, volontairement moqueuse et provocatrice. Si Wendy s’amusait à chercher les problèmes dans le témoignage de Séraphin, lui semblait tout autant se divertir des problèmes qu’elle-même soulevait dans ce qu’elle annonçait. La mère des jumeaux elle-même avait un sourire crispé. Elle avait fait une erreur qui allait lui coûter cher en crédibilité, elle le sentait.
« Toutes ? Non, pas toutes. Encore faudrait-il que Séraphin connaisse Tunnel.
- Pardon ? Mais son frère, Raphaël…
- Connaît effectivement Tunnel. Et c’est le seul des deux. Séraphin n’a jamais réussi à maîtriser la capacité. C’est d’ailleurs l’une des rares choses qui les différencie, avec le fait que Séraphin se tient toujours à droite, et Raphaël toujours à gauche, quand on leur fait face.
- O-oui… murmura Séraphin. J’ai effectivement utilisé le Tunnel, j’avoue… Mais c’est parce que j’ai voulu poursuivre le coupable et que je pensais qu’il s’était échappé, en fait… Penser que c’était Nitipon ne m’avait pas traversé l’esprit, il dormait à côté… »
Elle avait réussi à arriver à… Rien, en fait, si ce n’était le fait que tout s’expliquait et trouvait un sens. Les enfants avaient caché l’usage du Tunnel pour éviter de se faire suspecter, mais sinon… Elle n’avait aucune autre preuve… Nitipon demeurait coupable d’avoir creusé ce tunnel, donc le coupable légitime. Tant que le Tiplouf avait moyen d’y avoir accédé après le crime, alors le fait qu’il n’y ait pas d’arme et qu’un prétendu associé aurait pu rentrer était incontestable… Mais définitivement, les propos de Séraphin étaient louches ! Il fallait qu’elle joue sur autre chose…
« Tu peux me ré-expliquer ce que tu as vu dans le couloir ?
- Euh… Bien sûr ! Je… Je sortais de la chambre avec Armas, quand on a vu une silhouette passer à toute allure, sortant de chez Mme Sola. Elle s’est mise à courir jusqu’à l’autre bout de la pièce et s’est réfugiée dans la chambre au fond ! Elle portait un drap noir tout autour d’elle, j’en suis sûr et certain, c’est d’ailleurs pour ça, avec l’obscurité, qu’on n’a pas pu reconnaître la personne.
- Se déplaçait-elle sur deux ou quatre pattes ?
- Deux pattes. Elle n’était pas très rapide, mais suffisamment pour nous prendre de court.
- Pensez-vous vraiment qu’il s’agissait de Nitipon ?
- Il est allé dans la chambre où il était, je ne vois pas qui ça pourrait être d’autre… Et en plus il avait le drap sur lui. Pour nous c’était évident.
- Vous êtes ensuite allés dans la chambre ? Que s’y est-il passé précisément ?
- On a vu le corps… J’ai couru jusqu’à elle pour vérifier si elle respirait encore, Armas m’a suivi et, je… Euh… Je crois… Je crois qu’il est entré à ce moment-là, et le Pachirisu a libéré une trèèèès puissante décharge, de peur. »
Ce devait être une référence à Lumen. Cependant… Le fait qu’il hésitait était plutôt curieux. Quelque chose… Titillait Wendy, quelque chose d’évident. Elle ne mit pas très longtemps avant de mettre la patte dessus, avant de demander, de sa voix éternellement sereine mais qui était emplie d’un certain enthousiasme à présent :
« Alors, j’ai une question ! Sommes-nous bien d’accord qu’une décharge est globale et non maîtrisée ?
- C’est… C’est exact, je suppose. Oui, c’était bien une décharge qu’il a utilisée.
- Le témoin se souvient-il du type de Lumen ?
- Roche, qui est résistant à l’électrique… Mais ça n’a pas suffi à le défendre contre ça. Je me demande bien qui aurait pu… Hein ?
- Oui, je me demande bien aussi. »
Les yeux de Séraphin s’emplirent d’une frayeur inexplicable. Il venait de comprendre que Wendy l’avait piégé, et haut la patte. Toutes les personnes présentes étaient suspendues à ses lèvres. Certaines avaient déjà compris ; d’autres souhaitaient enfin qu’on leur explique. Armas semblait prêt à défaillir, il faisait des gestes de désespoir à la Phyllali, comme pour la supplier d’arrêter dès maintenant. Mais elle était allée beaucoup trop loin pour faire demi-tour. La voilà, la véritable contradiction du témoignage !
« J’ai une nouvelle question. Ce sera ma dernière pour toi, je te le promets, à moins que tu n’arrives pas à y répondre. Comment as-tu résisté à l’attaque sans te faire complètement sonner, à l’égal de Lumen, si tu étais si proche d’Armas qui plus est ?
- Objection ! s’écria Clocrut. L’attaque était dirigée vers Lumen, cela n’a aucune importance !
- Faux, répliqua Wendy d’un ton froid. Si Armas avait vraiment regardé le Kranidos avant de l’attaquer, alors cela voulait dire qu’il savait parfaitement à qui il s’en prenait, ce qui rend donc la chose plus grave encore ! Que préférez-vous ?!
- Je… Je… Pon, Pon, Ponchiot !
- Séraphin, comment expliques-tu le fait que tu ne te sois pas pris de décharge ?! J’exige une réponse immédiate ou je demande au Chef de te considérer comme suspect, au même titre qu’Armas ! »
La déclaration eut l’effet d’un gong sur tout le groupe qui se trouvait dans la CFB. La mère des Ponchiot était prête à se jeter sur elle pour lui arracher le visage, elle poussait déjà des cris de rage. Mais devant des preuves d’accusation qui démontraient plus que jamais la possibilité que les enfants mentaient, rendant tout leur témoignage caduque et pouvant conduire au vrai meurtrier, qui était sans doute eux-mêmes, tous les habitants avaient le devoir de la retenir. Ils attendaient patiemment que Séraphin réponde. Mais il n’y arrivait pas.
« Je… Je l’ignore…
- Pardon ? Tu ne vas pas me dire que tu as oublié ?
- Non… Non… Car… Car ce n’était… Ce n’était pas moi…
- Sois plus clair, s’il te plaît. »
Wendy n’avait plus envie de jouer. Maintenant qu’elle tenait la contradiction du Ponchiot, il allait falloir qu’elle appuie dessus jusqu’à faire éclater la vérité. Il leva ses yeux emplis de larmes vers elle, dans une sorte d’attente désespérée.
« Je… Je ne suis pas celui qui a tué Mme Sola… J’étais… J’étais dans la chambre de Nitipon… Quand… Quand le crime a eu lieu...
- Comment ça ? Mais Armas avait dit que tu étais avec lui ! Cela ne fait aucun sens !
- Armas confond sa droite et sa gauche, Mlle Wendy… J’ai menti… C’était Raphaël qui était avec lui… On ne voulait pas vous dire qu’il était là car c’était… Snif… Lui qui a creusé le tunnel, et que… Que… Que j’étais avec Nitipon pendant toute la période du meurtre… On avait peur d’être accusés, alors… Alors on n’a rien dit, mais… Mais… Nitipon… Il n’a tué personne... »
Et il fondit en larmes au milieu de l’assemblée silencieuse.
Le seul autre bruit qui perça fut produit par Wendy, qui reposait sa tasse vide avec une infinie satisfaction.